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Huit Mémos pour gérer les difficultés des élèves à l’école ordinaire

 

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Huit Mémos à découvrir


 

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Isabelle Bétrisey, professeure à la Haute Ecole pédagogique du Valais, au double parcours d’enseignante et de psychologue, a orchestré un vaste projet collaboratif à plusieurs niveaux dont les premiers fruits sont sur le point d’être récoltés et distribués dans les écoles valaisannes. Le résultat est à savourer sous la forme d’une mappe contenant huit Mémos thématiques pour gérer les difficultés des élèves à l’école ordinaire aux cycles 1 et 2.

Ce projet, soutenu par la Direction de la HEP-VS, le Service de l’enseignement (SE), la SPVal (Société pédagogique valaisanne) et l’AMES (Association des maître·sse·s de l’enseignement spécialisé du Valais romand), a été collaboratif à toutes les étapes. En effet, des étudiants, alors en dernière année de formation à la HEP-VS, ont co-créé ces Mémos avec le concours de professionnels de l’école valaisanne (enseignants spécialisés, psychologues, logopédistes, psychomotriciens). Ensemble, ils ont additionné leurs compétences pour un résultat s’inscrivant dans la continuité des fiches d’informations du CSPS . Le tout a ensuite été soumis à un comité de relecture pour s’assurer de la validité scientifique des contenus. «La valeur ajoutée de ces Mémos, c’est la collaboration entre des étudiants, des enseignants et des spécialistes, ce qui a permis d’aboutir à des documents pratiques à la fois très sérieux et bien vulgarisés», souligne Michel Beytrison, adjoint et remplaçant du chef du SE.

Parmi ceux qui ont été au cœur de cette aventure, l’enthousiasme est aussi de mise. Manuella Salamin, enseignante spécialisée et présidente de l’AMES, évoque avec plaisir les moments de partage autour du Mémo concernant la coordination: «Via ces outils, j’ai trouvé riche de pouvoir relier enseignement ordinaire et spécialisé et ainsi mettre en lumière tout ce que les enseignants font et peuvent faire en classe afin d’aider les élèves en difficulté.» Elle a beaucoup apprécié la manière de travailler ensemble: «Après la séance de cadrage général avec tous les groupes de façon à avoir une unité dans l’approche, avec Géraldine Lamon, psychomotricienne, nous avons dialogué avec la petite équipe d’étudiants impliqués afin d’apporter des compléments à leurs propositions aux différentes étapes.» Pour la présidente de l’AMES, cette formule ouvre de nouveaux chemins collaboratifs entre enseignants ordinaires et spécialisés: «Chacun a sa pierre à apporter à l’édifice et c’est une belle démonstration de ce que l’on peut faire ensemble.» Quant à Luca Bonascia, aujourd’hui enseignant en 8H à Bramois, mais qui faisait partie du groupe s’étant penché sur les questions liées à l’attention des élèves et qui avait par ailleurs eu pour mission de photographier les travaux de tous les groupes pour en conserver une trace, il livre un commentaire aussi très positif: «En tant qu’étudiant, c’était valorisant de pouvoir apporter quelque chose aux enseignants de terrain alors qu’habituellement à la HEP c’est toujours l’inverse.» Le Mémo auquel il a collaboré et qui lui a permis, pour reprendre son expression, de devenir «un micro-expert de l’attention» lui a été utile dès l’année dernière avec une élève TDAH, mais pas seulement. Grâce à cette expérience, Luca Bonascia estime avoir osé très vite essayer des mesures pour des difficultés d’attention repérées, sans avoir à attendre un diagnostic. L’ex-étudiant devenu enseignant se réjouit de découvrir la version imprimée: «Même si nous avions vu les panneaux des autres groupes lors d’un cours et pu écouter leurs présentations, je me réjouis d’avoir accès à ces Mémos pour prendre le temps de les lire, car ils ont été conçus et réalisés pour être synthétiques, rapides et efficaces, ce qui facilite la tâche de l’enseignant devant cerner les enjeux de l’une ou l’autre des problématiques traitées.»

Les établissements scolaires recevront prochainement, via la CECAME, quelques exemplaires de ces Mémos diffusés en tirage limité pour la phase test. D’autres titres possibles sont déjà évoqués. Bref, nous voici assurément au début d’une collection «Ensemble, on est plus fort». Un produit local à consommer sans modération.


 

isabelle Betrisey

Regard d’Isabelle Bétrisey, coordinatrice du projet

 

Quelle est l’origine de ces Mémos?

Dans le cadre de mon cours sur les notions de base en pédagogie spécialisée, je vise à sensibiliser les futurs enseignants des classes ordinaires aux difficultés rencontrées par les élèves. Chaque année, je propose aux étudiants de réfléchir autour d’une problématique et le fruit de leur travail en ateliers est toujours impressionnant. Régulièrement d’anciens étudiants me contactaient pour me demander si je pouvais leur envoyer les documents dont ils étaient en partie les auteurs. Du coup, j’ai pensé qu’on pouvait imaginer d’en faire quelque chose de pratique pour les enseignants, en allant au bout de la démarche, en valorisant ces travaux d’étudiants de la HEP-VS et en reliant l’institution de formation avec le terrain. Je me suis lancée dans la coordination de ce projet tout en préparant un master en psychologie positive, ce qui a par ailleurs permis de nourrir l’arrière-fond scientifique de manière rigoureuse.

 

Avez-vous pu facilement lancer ce projet?

Oui, mais rien n’aurait été possible sans la confiance de Fabio Di Giacomo au niveau de la HEP-VS, le soutien de Michel Beytrison et de Guy Dayer au niveau du SE, et les remarques motivantes du côté des associations professionnelles. En interne, Danièle Périsset m’a aussi beaucoup encouragée, tout comme d’autres collègues. Bref, j’ai une longue liste de remerciements.

 

Travailler ensemble pour apprendre ensemble, est-ce la clé?

La collaboration est l’ADN de ce projet. Les étudiants ont collaboré entre eux, puis sous le coaching des enseignants de terrain et des spécialistes lors de séances de travail. Et de mon côté, j’ai collaboré avec le SE, les associations professionnelles, différents collègues, des spécialistes en pédagogie et en pédiatrie, etc. Tout a été collaboratif, jusqu’aux illustrations, au graphisme et à la mise en page. «Ensemble on est plus forts», c’est vraiment mon slogan.

 

De quelle manière les étudiants ont-ils collaboré?

Je leur ai lancé le défi en début d’année en imposant les thématiques. Je souhaitais qu’ils s’engagent dans ce projet et trouvent du sens en créant un produit qui leur serait utile en stage puis dans leur pratique professionnelle et celle de leurs collègues.

 

Quelles sont les thématiques abordées?

Pour résumer, on peut dire qu’elles concernent le langage oral, le langage écrit, la coordination, l’attention, le haut potentiel, l’interaction sociale, l’anxiété et la déficience sensorielle auditive.

 

Comment ces huit thématiques ont-elles été choisies?

L’objectif via ces premières fiches était que l’on puisse traverser les divers champs de la pédagogie spécialisée. Les titres sont compliqués parce qu’au niveau de la démarche je voulais sortir du diagnostic. L’un des Mémos s’intitule par exemple: «Des difficultés à lire et orthographier aux troubles de l’apprentissage de la lecture et de l’orthographe». En classe, les enseignants ne voient pas un élève dyslexique, mais un enfant qui a de la peine à lire, aussi selon moi il était important de partir des manifestations des difficultés.

 

La collaboration est l’ADN de ce projet.

 

Cette différenciation ne peut-elle pas aussi être aidante pour tous les élèves, et pas seulement ceux qui ont des difficultés ou des troubles visibles?

Certaines pistes peuvent s’avérer opportunes pour tous les élèves dans l’esprit de la pédagogie universelle. Plutôt que de prendre de l’énergie pour Quentin qui est dys, Ricardo qui n’en fait qu’à sa tête, Marine qui est tout le temps dans la lune, pourquoi ne pas partir des besoins du groupe-classe en proposant aujourd’hui ce qui aidera Marine et finalement pas seulement elle? Si l’enseignant surligne pour aider un élève qui a des troubles d’attention, cette stratégie peut simplifier la tâche de celui qui est dys ou même HP et qui en a marre de tout lire. Possiblement, certaines stratégies peuvent être bénéfiques pour tous les élèves de la classe et dans une perspective inclusive également pour l’enseignant qui peut alors apprécier la diversité des profils d’élèves, en oubliant les étiquettes.

 

De quelle manière la structure commune à l’ensemble des Mémos est-elle construite?

Il s’agissait d’allier uniformité et singularité. Sur la première page, on découvre l’histoire d’un enfant, de façon à avoir un récit emblématique de la difficulté et sur la dernière des références et personnes-ressources sont suggérées, étant par ailleurs accessibles sur une page du site de la HEP-VS. La partie centrale du document part des indices pour repérer et comprendre les difficultés et troubles puis propose des pistes concrètes pour accompagner et valoriser. La valorisation a des impacts positifs à tous les niveaux, aussi bien pour les apprentissages que pour l’estime de soi. Ainsi l’élève dyslexique n’a pas que des problèmes, il a aussi des superpouvoirs.

 

Quelle est la suite de ce projet?

Cette année, nous lançons la phase test qui permettra d’apporter des améliorations, car ce matériel est perfectible à partir des remarques d’enseignants. Ce projet se veut par ailleurs évolutif, avec, je l’espère, de nouvelles fiches sur d’autres thématiques ou pour d’autres degrés, et des mises à jour si nécessaire avec pourquoi pas d’autres outils. L’année passée, les étudiants ont travaillé sur d’autres ressources, en créant des jeux de pistes ou des boîtes à outils. Et cette année, ils ont imaginé des courtes vidéos qui sont des perles.

 

Avez-vous déjà un autre rêve rassembleur pour l’école valaisanne?

J’adorerais prendre mon bâton de pèlerin pour aller dans toutes les écoles valaisannes à la recherche des bonnes pratiques, car il y aurait tant de trésors à valoriser sous la forme d’un livre ou d’un site. Dans le contexte actuel où les enseignants souffrent de fatigue et de manque de reconnaissance, je suis persuadée qu’aller vers eux, sachant qu’ils ne se mettront pas en avant, serait une formidable idée pour partager toutes ces ressources précieuses. J’imaginerais quelque chose dans le style de l’émission «On va vers le beau» diffusée sur la RTS, mais dans le créneau pédagogique.

 

Propos recueillis par Nadia Revaz


 

Tous les liens vers les références et ressources

www.hepvs.ch/memos


 

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