La classe d’adaptation de Natacha Lerjen vend son livre de recettes illustrées
Sous la houlette d’Isabel Emery, enseignante en économie familiale au CO de Saint-Guérin à Sion, et de Benjamin Troillet, stagiaire CPS (centre pédagogique spécialisé), la classe d’adaptation de Natacha Lerjen a mené un projet interdisciplinaire de longue haleine consistant à rédiger un livre de recettes. Le travail a été mené en cuisine et sur ordinateur.
Le 13 juin dernier, l’enseignante titulaire ayant supervisé la démarche accompagne ses élèves lors de la rédaction du message pour vendre leur livre richement illustré. Le cours a débuté, Natacha Lerjen questionne la classe pour savoir quels arguments mettre en avant afin d’inciter les enseignants de l’école à passer commande. Les élèves ont déjà commencé à co-écrire ce texte pour dire comment ils ont conçu ce livre qui est composé d’images permettant de découvrir chacune des étapes des recettes, avec des textes en écriture simplifiée en accompagnement. Parfois le stagiaire, qui les a suivis durant tout le projet, effectue des relances à partir de souvenirs communs. Soudain, un élève lance avec une spontanéité désarmante: «Mais pourquoi vendre notre livre?» Natacha Lerjen et plusieurs élèves lui rétorquent que le résultat est à la fois de qualité et original. «En général, il y a surtout des textes dans les livres de recettes de cuisine, alors que dans le nôtre il y a surtout des illustrations», argumente l’un d’eux.
Ce projet a tout de suite motivé le stagiaire CPS, ce qui était primordial sachant qu’il fallait pouvoir compter sur sa force d’entraînement. Il s’agissait bien sûr d’abord de faire les achats, avant de passer à la pratique culinaire, puis à la phase d’écriture. Durant l’année scolaire, les vendredis, les élèves ont expérimenté les recettes avec Isabel et les lundis, Benjamin les invitait à expliquer comment ils avaient procédé, en indiquant les ingrédients nécessaires et en décrivant les photos en quelques mots. Si tout s’est déroulé dans une certaine lenteur pour cette classe d’adaptation, tout s’est surtout fait dans la collaboration, en duos. «Ce n’était pas toujours facile de faire des choix à deux, mais Benjamin était là pour nous aider», lance un élève. Les voilà qu’ils parlent de leur première recette, celle des «Nuggets sains».
Afin que le livre soit un bel objet, la classe a réfléchi à la mise en page. Les élèves évoquent le choix des couleurs pour chacune des recettes, le rôle des petits personnages qui prodiguent des conseils ou livrent des remarques. L’une des jeunes explique que les mascottes sont aussi parfois là pour rappeler que «si c’est fait maison, c’est meilleur».
Quel fut le moment préféré du projet? «J’ai aimé cuisiner avec Isabel et j’ai aimé faire le livre avec Benjamin», résume une élève, incapable de trancher. Pour un autre, le temps fort, c’était la préparation du plat de lasagnes. Pour un autre encore, ses souvenirs les plus marquants sont associés aux dégustations.
Isabel Emery raconte que cet ambitieux projet a été enthousiasmant, même s’il lui a bien sûr fallu s’adapter et davantage détailler les gestes de base à acquérir en cuisine. Cette expérience l’a convaincue des atouts d’une approche plus explicite pour guider les élèves à gagner en autonomie, et pas seulement pour les classes d’adaptation. «C’est du reste parce qu’il me fallait sans cesse leur répéter à chaque début de cours de mettre leur tablier et de se laver les mains que l’idée est venue d’ajouter une page en début de livre à propos de ces routines, avec aussi des indications sur le choix des produits», souligne-t-elle. Elle relève qu’en allant à leur rythme tout en les stimulant pour les faire persévérer dans les tâches, les élèves ont manifesté le plaisir d’aller au bout des recettes. «Dans cette classe, l’hétérogénéité était particulièrement grande, aussi j’ai dû tenir compte des spécificités de chacune et de chacun, certains ayant des difficultés à tenir correctement un couteau alors que d’autres ont tout de suite fait preuve d’une grande dextérité pour faire des découpes régulières», constate l’enseignante. Pour sa part, Benjamin Troillet confie avoir beaucoup appris grâce aux élèves à travers ce projet: «Au départ, je voulais trop les accompagner et j’ai progressivement modifié mon attitude en leur permettant de réussir par eux-mêmes.» Et d’ajouter: «A la fin, je les laissais gérer, n’intervenant plus que ponctuellement, ce qui leur a permis de communiquer entre eux et gagner en confiance.»
Au terme de ce projet valorisant la créativité, un sentiment de fierté émane de la classe. Natacha Lerjen est épatée par le travail accompli par ses élèves. «Ce livre est vraiment beau et pratique», observe-t-elle. «Jamais cela n’aurait pu se faire sans le dynamisme et la bienveillance de Benjamin», insiste Isabel Emery, touchée par l’enthousiasme communicatif qu’il a réussi à transmettre aux élèves qui se seraient vite découragés face à l’envergure de la tâche sans cet élan et cette complicité. «Au fur et à mesure, voyant l’implication de tous, je savais que le résultat serait une réussite», confie-t-elle encore. Natacha, Isabel et Benjamin sont unanimes pour dire combien cette aventure a permis aux élèves de cette classe d’évoluer et de progresser.
Assurément, ce livre pourrait contribuer au plaisir de cuisiner des enfants allophones qui ne maîtrisent pas encore bien le français, de ceux rencontrant des difficultés scolaires ou d’enfants du primaire. A noter que les familles y trouveront aussi un guide adapté pour cuisiner ensemble à la maison.
Nadia Revaz
A propos du livre
Ce livre, illustré et coloré, contient 20 recettes et coûte 35 CHF. L’argent collecté servira à financer une sortie scolaire. Pour plus d’infos ou passer commande: s’adresser à natacha.lerjen(at)edu.vs.ch