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Formation continue des médiateurs et psychologie positive

Chaque année, les médiatrices et les médiateurs de tous les degrés scolaires (primaire, CO, secondaire II général et professionnel) sont invités à une journée de formation continue organisée par le Service cantonal de la jeunesse (SCJ).

Lors de l’édition 2022, qui s’est déroulée le 16 novembre dernier à l’Ecole professionnelle artisanale et service communautaire (EPASC) à Martigny, le programme s’est articulé autour de l’épanouissement grâce à la psychologie positive et au programme CARE. L’objectif était d’offrir aux médiateurs des pistes leur étant destinées afin qu’ils puissent eux-mêmes se sentir bien dans leur activité professionnelle, d’où le choix d’un intervenant externe n’étant pas un familier du monde scolaire.

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Lors des ateliers pratico-pratiques

 

Fabrice Clivaz est psychologue et psychothérapeute FSP (Fédération suisse des psychologues), instructeur de méditation en pleine conscience et de psychologie positive, ainsi que formateur et superviseur. Il a longtemps travaillé dans le secteur des addictions, notamment à la Villa Flora. En 2019 il s’est formé à la psychologie positive et au programme CARE à Grenoble. Depuis 2020, Fabrice Clivaz propose à des petits groupes un cycle de 8 séances de 2 heures sur 8 semaines basées sur ce programme pour développer un bien-être durable et une plus grande résilience. En juillet 2022, il a ouvert à Sierre son cabinet «Le Moment Présent». Pour cette journée de formation continue, il a d’abord rappelé ce que la psychologie positive n’est pas, à savoir une approche individualiste et une dictature du bonheur. Il a ensuite évoqué la fondation de la psychologie positive en 1998 par Martin Seligman et notamment abordé la puissance des émotions agréables et l’indispensable repérage des forces de caractère et des valeurs. Dans une deuxième partie, il a présenté le programme CARE (acronyme de Cohérence – Attention – Relation – Engagement), insistant sur la flexibilité psychologique et ses axes de développement. 

Pour donner suite à la théorie, les participants, répartis en plusieurs équipes, se sont focalisés sur l’épaississement d’un moment satisfaisant, sur le repérage de leurs forces et valeurs, et ont réfléchi à des activités pour prendre soin d’eux et explorer d’autres points de vue pour faire face à un défi. Pour l’anecdote, la première question posée par une médiatrice était liée au transfert possible de ces activités pour les élèves. S’occuper d’abord de soi n’est pas un réflexe naturel pour nombre d'enseignants.

Au terme de la journée, selon les dires de plusieurs médiatrices et médiateurs, avoir pu découvrir dans les grandes lignes ce programme CARE était intéressant. Ils soulignent que ce temps annuel de formation continue leur donne l’occasion pendant quelques heures de se poser pour apprendre et élargir leur réseau.

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Sylvie Nicole-Dirac communique son enthousiasme

 

Sylvie Nicole-Dirac, responsable régionale du Centre pour le développement et la thérapie de l’enfant et de l’adolescent (CDTEA) de Martigny et coordinatrice de la médiation scolaire pour le Valais romand, a conclu cette journée en évoquant l’importance pour les médiatrices et médiateurs de s’occuper d’eux sachant que cela aura un effet sur leur environnement. Ce fut aussi l’occasion de présenter Natalie Zen-Ruffinen et Vanessa Murmann, responsables de la formation continue au sein de l’équipe de la médiation scolaire présidée par Romaine Schnyder.

 


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Fabrice Clivaz, psychologue et psychothérapeute

INTERVIEW

Au début de votre présentation, vous avez dit que vous aviez commencé par avoir une image déformée de la psychologie positive. Quel a été le déclencheur de votre changement de regard?

Même si j’en avais entendu parler dans le cadre de formations, j’avais l’impression que la psychologie positive voulait nier les émotions désagréables, avec un diktat du «tout va bien» et une insistance à outrance sur la performance. Sur LinkedIn, un jour j’ai vu une pub pour un livre sur ce thème paru chez Dunod. Le sérieux de la maison d’édition associé au nom de Christophe André a suffi pour me donner l’envie d’en savoir plus. Grâce à cette lecture, j’ai alors perçu les liens avec la méditation en pleine conscience, approche que j’utilise depuis 2015.

Vous avez expliqué que la démarche consistait avant tout à investir une expérience agréable et à l’épaissir…
Le but, c’est en effet de donner du corps et de la densité à une expérience réelle, souvent rendue invisible à cause du fameux biais de la négativité. La psychologie positive, fille des thérapies comportementales, tout en étant basée sur des approches humanistes, n’est pas la panacée pour résoudre tous les problèmes, mais c’est une approche dont le découpage et les processus peuvent aider à gagner du temps pour être bien avec soi sans se juger.

 

Quel lien établissez-vous entre la psychologie positive et les maximes des Pères du désert?

A mes yeux, la psychologie et la sociologie, tout en se basant sur des données scientifiques, nous apprennent des choses qui étaient déjà présentes depuis les débuts de l’humanité. La parole des Pères du désert ne me semble pas éloignée de la psychologie positive. Idem, quand on regarde du côté des alcooliques ou des narcotiques anonymes, on retrouve la notion de résilience et l’envie de s’épanouir en capitalisant sur les forces de l’individu et du groupe.

 «La parole des Pères du désert ne me semble pas éloignée de la psychologie positive.»
Fabrice Clivaz

 

En quoi le rôle du «et en même temps» dont vous avez parlé est-il si fondamental?

L’idée du «et en même temps» autorise l’ambivalence, alors même que l’on est en recherche de cohérence. Cette expression favorise la prise de conscience de la complexité de la réalité. Ce «et» exprimé à haute voix contribue à éviter les comportements automatiques dommageables, tout en incitant à faire preuve de flexibilité psychologique. On peut être à la fois triste et content.

 

Face à autrui, pourquoi l’écoute doit-elle être privilégiée par rapport à l’envie spontanée de rassurer ou de motiver?

Sans s’en rendre compte, en voulant tout de suite rassurer ou motiver, on fait de l’évitement émotionnel. Même si la résolution de problèmes est essentielle, il faut parfois savoir ne pas vouloir chercher la solution dans l’instant. Afin de dégager des pistes pour faire autrement dans une situation similaire la prochaine fois, un temps d’écoute est indispensable.

 

Comment passer de l’idéal à l’optimal dans l’esprit de la psychologie positive?

En cessant de viser la perfection et en prenant soin de soi. Pratiquer l’auto-compassion, c’est une hygiène de vie mentale. Les routines ont un effet rassurant, cependant s’adapter à l’optimal est indispensable dans certaines situations en s’appuyant sur ses forces et ses valeurs. Pour y parvenir, il s’agit aussi de s’équiper pour accepter toutes les émotions et les pensées, dont celles qui sont douloureuses, afin de pouvoir identifier les informations utiles.

 

Propos recueillis par Nadia Revaz

 


 Trois lectures suggérées par Fabrice Clivaz


L psychologie positive1Monique Borcard-Sacco in La psychologie positive – Pour apprendre à se relier à soi (Guy Trédaniel Editions, 2019).

 

L psychologie positive2Rebecca Shankland, Jean-Paul Durand, Marine Paucsik, Ilios Kotsou et Christophe André in Mettre en œuvre un programme de psychologie positive – Programme CARE (Cohérence – Attention – Relation – Engagement) (Dunod, 2018)

 

L psychologie positive3
Jérôme Palazzolo (préface de Fabrice Midal) in La psychologie positive (Que sais-je?, 2020)

 

Infos sur la médiation scolaire sur le site du SCJ

 


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